Valérie Pécresse devait hier participer à un grand tralala à l'ENS
Ulm sur l'avenir de la recherche en informatique. Déjà dans les jours
précédents, vue la mobilisation révélée par les manifestations de mardi,
décision avait été prise de réduire la voilure
(http://sciences.blogs.liberation.fr/home/2008/05/informatique-et.html)
pour essayer d'éviter les problèmes dus à trop de publicité autour de cet
évènement. Las, cette modestie nouvelle n'a servi à rien.
Pécresse, qui devait d'abord visiter le
département d'informatique, puis présider une
table-ronde dans la salle des Actes, n'a pu faire ni l'un ni l'autre, et
a dû se se réfugier dans les bureaux de la direction, au dehors
desquels continuaient à retentir les huées et slogans qu'elle avait dû
essuyer à son arrivée, et qui accompagneront à nouveau son départ
("Pécresse, assassin du CNRS" - "Qu'est-ce qu'on veut? Le retrait de la
LRU!" - "Qu'est-ce qu'on veut? Le maintien du CNRS!"). D'où de petits pétages de plomb devant tant
d'impudence à refuser de se laisser réformer - ainsi la directrice d'Ulm
tenta-t-elle d'arracher la banderole (qui disait "Non à la
vente à la découpe du CNRS!" et qui refusa donc de se laisser arracher).
Et puis un beau déballage de l'hypocrisie habituelle: Pécresse, interrogée
bien malgré elle par le vice-président de Sauvons la Recherche sur la
division du CNRS en instituts, a eu le culot de répondre que le dialogue
avec le personnel et les instances continuait (elle a dû oublier ce
qu'elle a raconté au Monde...)
Bref, une visite bien perturbée par des manifestants nombreux, jeunes
(beaucoup d'élèves de l'école), et plus que motivés. Tout ceci malgré une
organisation en dernière minute.
Ci-dessous le tract diffusé à cette occasion:
"PECRESSE REFORME LA RECHERCHE EN
CATIMINI. VISITE SURPRISE À L'ENS.
V. Pécresse annonce le démantèlement du CNRS en six instituts afin de se
débarrasser de son 'organisation complexe' et de son 'morcellement' (Le
Monde, 20.05.08): découper pour contrer le morcellement, il fallait y
penser! Grands absents du découpage: la biologie et l'informatique.
C'est donc sans doute pour rassurer les chercheurs qu'elle vient visiter
en secret le laboratoire d'informatique de l'ENS! Toutefois, seuls les
chercheurs d'équipes associées à l'INRIA l'intéressent et sont
représentés à la table-ronde avec Pécresse d'aujourd'hui sur l'avenir de
la recherche en informatique qu'elle tiendra devant les journalistes et
la direction de l'ENS. Quel meilleur moyen en effet que le dépeçage du
CNRS pour asservir la recherche aux intérêts industriels (l'INRIA dépend
pour moitié du ministère de l'industrie) et des grandes entreprises
(l'INRIA a développé un centre de recherche commun avec Microsoft)? Déjà
l'ANR favorise une recherche pilotée autoritairement par le ministère,
effectuée par des agents contractuels et précaires. Nous exigeons le
maintien dans le cadre du CNRS d'une recherche fondamentale,
indépendante des intérêts économiques, capable de prendre des risques,
sachant s'atteler à des défis scientifiques de longue haleine. Celle-ci
ne peut être faite que par des agents et des chercheurs titulaires d'un
statut stable, maîtres de leur sujet de recherche, déterminant les
critères d'évaluation de leurs pairs (à l'opposé de l'AERES)".